L’auto-construction d’un semoir en semis-direct dans un système de conservation des sols : le témoignage de Benjamin
"Aujourd’hui le semis-direct est fondamental dans notre secteur et dans notre contexte pédoclimatique. On le voit très bien avec le changement climatique. On le prend de plein fouet. On est dans des zones intermédiaires très séchantes. Notre principale préoccupation sur la ferme c’est la gestion de l’eau. Et cette gestion de l’eau elle passe par le non-travail du sol ». Benjamin AUDE
Le témoignage vidéo de Benjamin à découvrir en bas de l'article
Rencontre avec Benjamin, céréalier en agriculture de conservation
Benjamin gère avec son épouse une exploitation de 130 hectares uniquement en Grandes Cultures. Située dans le sud des Deux-Sèvres, l’exploitation évolue dans des terres argilo-calcaires très superficielles qui ont la particularité de se réessuyer vite. Avec un taux d’argile qui varie de 35 à 60%, les terres peuvent être très collantes. Benjamin explique qu’il s’agit d’un contexte pédoclimatique qui est fortement soumis aux contraintes de la météo.
La conduite de l’exploitation est à 100% en agriculture de conservation (ACS) depuis 4 à 5 ans. Cette pratique culturale induit une absence de travail du sol, une rotation les plus longues possibles et une couverture permanente du sol par les cultures, par les chaumes ou par les couverts végétaux.
Sur la ferme, Benjamin cultive ses propres semences pour les couverts végétaux au printemps et pour les céréales en culture d’hiver/automne. La mise en place des couverts végétaux se fait entre chaque culture. Dans sa rotation, il compte 10 à 12 cultures différentes.
Au niveau matériel, Benjamin va utiliser un semoir à dents semis-direct en partie auto-construit et un strip-till également auto-construit qui a été réalisé sur une base d’un rotovator à dents droites. Avec la pratique de l’ACS, Benjamin explique qu’il n’a pas besoin de beaucoup de matériels.
Les raisons d'une conduite de l'exploitation en agriculture de conservation
Comme l’évoque Benjamin, c’est d’abord un choix économique qui, à la fois, permet de faire face au contexte pédoclimatique. Sur l’exploitation, le potentiel en céréales (orge, blé) tourne autour de 55-60 quintaux avec des grosses variations dans des années très sèches.
« On est très vigilant sur la partie charges de mécanisation »
Prendre le virage de l’ACS a permis de réduire de 150€/ha les charges de mécanisation par rapport aux années passées. Le poste carburant a été divisé par deux et le coût en matériel est faible.
Au-delà de l’atout économique, l’ACS est aussi un moyen de réduire le temps de travail et de pouvoir se libérer du temps pour d’autres activités. Dans le cas de Benjamin, ce gain de temps lui est favorable pour son activité de prestation de service qu’il réalise en famille. La gestion des charges de mécanisation et du temps étaient indispensables.
Auto-construction d'un semoir à semis-direct : le choix d'un semoir à dents
Benjamin a profité de l’expérience et l’historique de son père, qui travaillait en TCS auparavant, pour faire le choix de son semoir. Equipé à l’époque d’un semoir à disques, Benjamin a fait le choix en reprenant l’exploitation d’opter pour un semoir à dents. Plusieurs raisons l’ont poussé vers ce modèle.
La première raison est liée à l’investissement de départ qui est bien moindre par rapport à un semoir à disques. L’entretien est aussi plus simple et moins couteux. Les risques de casse et d’usure sont également plus faible avec un semoir à dents.
« Je suis attachée aux fondamentaux au niveau des semoirs »
C’est la deuxième raison évoquée par Benjamin. En effet, il recherche avant tout un bon placement de la graine et un bon contact terre-graine. Il n’est pas attaché au rendu visuel de la culture mais plutôt aux fondamentaux du semis :
« Une belle levée est la composante principale du rendement ».
Le choix de se tourner vers un semoir à dents est aussi du aux conditions pierreuses du sol. La dent va chasser les pierres en surface contrairement au disque qui passe dessus. Cela permet d’avoir un bon dégagement au niveau de la ligne semis. La dent permet aussi d’assurer une meilleure réussite des couverts et semis d’été notamment le colza qui est semé en ultra-précoce (début juillet).
Comme l’explique Benjamin, la dent permet de descendre davantage en profondeur (5-7 cm) et de générer de la terre fine autour. Les contraintes sont assez fortes au niveau des sols, surtout en été, d’où l’intérêt du semoir à dents.
Utilisation et configuration du semoir auto-construit
Benjamin utilise son semoir auto-construit pour toutes ses cultures : colza, blé, orge, féverole, pois, vesce. Au printemps, le semoir est utilisé pour semer du carthame, du sorgho fourrager ou encore de la luzerne. L’idée était d’avoir un semoir polyvalent qui soit capable de semer n’importe quelle culture dans toutes les conditions.
Après son semis-direct, le passage du rouleau est systématique pour plusieurs raisons : rappuyer les pierres, refermer la ligne de semis, avoir un bon contact terre-graine mais aussi gérer les limaces et stopper l’évapotranspiration.
Le semoir de 5 mètres est équipé de double descente avec double trémie pour pouvoir fertiliser sur la ligne semis. Cette combinaison permet de minimiser le coût de l’apport d’engrais et de gagner des étapes de travail. Dans un contexte séchant, l’intérêt est aussi de pouvoir localiser l’engrais et d’optimiser au mieux cet apport. Sur le plan environnemental, les éventuelles pollutions atmosphériques sont évitées. Enfin, l’avantage de la double distribution est aussi de pouvoir mettre sur la même ligne plusieurs espèces différentes.
Concernant la trémie, Benjamin s’est équipé d’un modèle assez simple datant des années 90 qui est un porte outil derrière lequel il a disposé un vibroflex.
La trémie est entrainée mécaniquement par une roue qui vient se poser sur la roue du semoir. Les axes et les pignons permettent de faire tourner les distributions. « Je ne suis pas un féru de technologies. J’aime les choses simples et relativement fiables ».
Sur le vibroflex, Benjamin a adapté deux têtes de distribution avec des colonnes. Concernant les éléments semeurs, l’outil est équipe de 3 rangées de dents avec un dégagement de 80 cm entre chaque élément. Il a opté pour des pointes fines en 16 mm pour leur solidité ainsi qu’une double descente à multi-réglages.
A l’arrière, Benjamin a fait le choix d’installer une herse chaine qu’il a légèrement modifiée pour qu’elle soit adaptée à ses conditions de terrains (argileuses). Pour cela, il a doublé la chaîne ce qui permet de l’alourdir.
Contrairement aux peignes, le système de chaine demande moins de réglage. Le risque de casse pendant les manœuvres est aussi minimisé. Une conception simple dont Benjamin est pleinement satisfait et qui a aussi l’avantage de causer moins de problème de bourrage et d’être peu couteuse.
Cette configuration du semoir présente plusieurs avantages.
S’agissant d’un porte-outil, Benjamin peut facilement adapter n’importe quel outil à l’arrière. De plus, l’entrainement mécanique permet d’avoir un tracteur de faible puissance à l’avant. Un tracteur de 90ch suffit pour trainer l’outil. Benjamin explique que sa consommation tourne autour de 3,5 à 4L/ha pour une vitesse qui va de 6 à 10 km/h. Autre avantage : la capacité du semoir (3600L) qui est assez importante et qui permet une grande autonomie
Dans la conception du semoir, Benjamin a repris des bases simples et mécaniques dans un souci de fiabilité. Comme il l’a indiqué, il n’a pas d’attrait pour la technologie et préfère la simplicité.
Lors du semis, Benjamin contrôle depuis sa cabine le bon fonctionnement de la distribution. Il garde un œil sur la roue d’entrainement et sur le doseur.
« Un semoir simple, efficace à un coût raisonnable »
Pour un semoir à la conception optimale, Benjamin a aussi fait quelques adaptations et notamment l’installation d’une guillotine pour couper une trémie si besoin, notamment pour faire des tests.
C’est un ensemble qui est très léger. Benjamin veille au poids de ses outils puisqu’en Agriculture de Conservation il faut éviter de tasser les sols. Aujourd’hui, l’ensemble une fois chargée ne dépasse pas les 5 tonnes et répond donc aux préconisations pour préserver les sols.
Temps de conception et coût du semoir à semis-direct
« Sur la partie semoir, il m’a fallut à peine 5 jours pour le configurer »
Qui dit conception simple, dit conception rapide. En quelques jours, Benjamin a pu transformer un outil de travail du sol en semoir à un coût très raisonnable. En partant d’un vibroflex et en utilisant des pièces plutôt « classiques », les adaptations faites sur l’outil ont été rapidement réalisés.
Benjamin explique qu’il s’est montré vigilant dans le choix de ses doubles descentes. C’est d’ailleurs de qui a demandé le plus de recherche dans la conception du semoir. Le point de chute et « l’effet toboggan » sont des éléments à prendre en compte pour un bon placement de la graine.
En termes de coûts, l’ensemble du semoir représente un investissement de 8000 euros. Aujourd’hui, le poste semoir revient à 6€/ha. Avec cet outil, Benjamin réduit ses charges de mécanisation tout en préservant la qualité de ses semis.
L'agriculture de conservation : une nécessité pour l'exploitation de Benjamin
« La moindre goutte d’eau, il faut qu’on la préserve »
Pour Benjamin, l’ACS intervient pour des raisons économiques mais aussi pour des questions de gestion de la ressource en eau. Préserver la moindre humidité dans le sol grâce au semis-direct, ne pas perturber le sol, c’est ce que tente de faire Benjamin en travaillant en semis-direct.
« Les couverts végétaux sont un outil de travail du sol »
Les couverts végétaux interviennent pour structurer le sol grâce aux racines et à l’activité microbiologique. Avec ce système, Benjamin peut semer dans de bonnes conditions. L’intérêt des couverts est de nourrir le sol mais aussi de le couvrir pour éviter un trop fort rayonnement solaire en été. C’est essentiel pour la biodiversité mais aussi pour la qualité de l’eau. Les couverts ont, en effet, un rôle à jouer dans l’infiltration. En cas d’intempéries, le sol est capable d’absorber de fortes quantités d’eau et d’éviter l’érosion.
« On le voit depuis plusieurs années, on a à faire à des phénomènes météo qui sont extrêmes. A la fois des sécheresses mais aussi une pluviométrie importante. Il faut qu’on s’adapte et c’est pourquoi on a pris le pli de l’ACS sur la ferme. Pour des raisons économiques mais aussi par rapport au contexte environnemental ».
Pour découvrir le témoignage en vidéo de Benjamin, c'est par ici ►
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