Zoom sur l’auto-construction !
Vous vous posez des questions sur l'auto-construction ? Vous êtes en recherche de solutions ? Découvrez le témoignage de Nicolas, auto-constructeur en Alsace.
Très en vogue ces dernières années, le Do It Yourself (DIY) autrement dit l’art du « faire soi-même » s’invite dans le secteur du machinisme agricole !
En effet, de nombreux agriculteurs et agricultrices franchissent le pas de l’auto-construction. Leur volonté ? S’émanciper en se réappropriant des savoir-faire perdus, être autonome et s’équiper d’un outil adapté à leurs besoins et/ou technique culturales.
En faisant le choix de l’auto-construction, de nombreux avantages s’offrent aux agriculteurs : des économies sur le long terme, un faible investissement, une autonomie technique et économique, etc.
La fabrication « maison » de ses outils agricoles permet également de palier divers problèmes agronomiques dont les solutions sont inexistantes dans le commerce.
Pour faciliter leur démarche et se former aux pratiques d’auto-construction, les agriculteurs peuvent compter sur des coopératives. Des formations sous forme d’ateliers sont organisées par la coopérative. Leur ambition : aider les adhérents à concevoir des outils adaptés dans un esprit collectif et collaboratif.
L’auto-construction, c’est aussi un réseau, un collectif d’entraide qui partage leurs savoirs et savoir-faire dans le but de développer les techniques d’auto-construction.
En parlant de réseau, on peut citer l’association BASE (Biodiversité, Agriculture, Sol et Environnement). Cette association est née en 2000 et compte plus de 12000 adhérents, dont des agriculteurs et des techniciens soucieux d’étoffer leurs connaissances sur les nouvelles méthodes de conservation des sols. En effet, l’objectif de l’association BASE est de rassembler de nombreux professionnels passionnés par l’agriculture de conservation et par le fonctionnement de l’écosystème du sol et bien évidemment d’échanger, mettre en commun les expériences de chacun pour contribuer au développement d’une agriculture durable.
Interview d’un auto-constructeur alsacien et client d’Agripartner : Nicolas
Pouvez-vous nous présenter votre ferme (type d’exploitation, nombre d'hectares, types de terre, etc.) ?
Ma ferme compte 100 hectares de SAU (Surface Agricole Utile), 32 % de prairies et 68% de cultures.
Nous avons un cheptel bovin de 150 animaux soient 65 vaches laitières et leur suite. On vend 600 000 litres de lait par an en système laitier de plaine. Le parcellaire est éclaté dans un rayon de 15 km.
Les sols sont assez hétérogènes, non irrigués avec peu de précipitations annuelles. La sécheresse est devenue courante sur notre secteur depuis 2005.
Concernant le type de terre on compte, grosso modo, 1/3 de la surface en argiles de bas-fonds et limons profonds, 1/3 en argiles moyennement profond en coteaux, 1/3 d’argiles superficielles ou sableux hydromorphe.
La topographie est moyennement vallonnée et les sols sont très sensibles à l'érosion (pente, climat sanguin avec orage de 50mm en 10 minutes) dans une région à forte densité de population (350 habitants/km2) avec un village tous les 1.5km.
Assolement 2020 :
- Prairies naturelles et temporaires : 32 ha
- Luzerne : 7 ha
- Sorgho mono coupe : 5 ha
- Graminées porte graine : 5 ha
- Orge hiver : 6 ha
- Maïs : 23 ha
- Blé hiver : 22 ha
Depuis 1999, on procède à l’implantations de couverts multi espèces. Et depuis 2015, on a une couverture totale de la surface toute l'année. On réalise de bas volume et on a réduit les doses de phytos (environ 1/4 des doses préconisées) depuis 2005.
La ferme est en totalité en agriculture de conservation depuis 2006 (commencement de la démarche dans les années 90).
Ces méthodes ont permis de supprimer l'érosion dans nos parcelles, d'augmenter leur fertilité (taux d'humus moyen est passé d'une moyenne de 2% dans les années 2000 à 3,7% actuellement) et surtout d'avoir une meilleure efficience de l'eau. Le travail du sol se limite à la préparation du lit de semis avec des outils de déchaumage (disques ou dents, non-animés).
Pourquoi avoir fait le choix de l’auto-construction ?
Vous comprendrez qu'avec ce type de configuration, le matériel standard peut faire l'affaire un temps mais montre vite ses limites car soit c'est hors de prix soit c'est techniquement inadapté (gabarit, conception, poids, etc.) d'où les modifications réalisées sur certains matériels.
Quel type de matériel agricole avez-vous auto construit ?
En travail du sol, pour l'instant nous avons seulement effectuer des modifications sur le semoir à céréales, un Horsch Pronto RX présent sur la ferme depuis 2002.
En l'état, le semoir est fonctionnel, fiable, léger avec un bon débit de chantier (vitesse de semis entre 14 et 16 km/h même en petites graines) mais il ne me permet pas de passer sur des sols peu travaillés ou dans des couverts, sans trop remuer. C’était ma problématique.
En effet, la machine est munie d'une rangée de bêches roulantes avant le rouleau et cela travaille trop le sol à mon goût.
J'avais longtemps cherché à le modifier pour remplacer les bêches par un disque ouvreur mais ça n'a pas été chose facile surtout que le dégagement sous bâti est très faible. Soit le constructeur me proposait une solution à 8000 euros avec réglage manuel de la profondeur, soit j'achetais un autre semoir, soit je trouvais une autre solution…
Quelles pièces avez-vous utilisé ? Pourquoi ?
Pour continuer un peu plus loin dans l'agriculture de conservation il me fallait un semoir qui puisse passer sur une culture déjà implantée ou dans un couvert ou bien sur sol très peu voire pas du tout travaillé.
C'est pour cela que je me suis orienté vers un système de semis triple disque (1 disque ouvreur + un double disque semeur) car on passe mieux dans les résidus sans perdre en débit de chantier.
Le disque ne pourra pas couper tous les résidus mais on aura moins d'effet de pinning (paille dans le sillon de semis) qu'un monodisque. Je ne voulais pas que ça travaille de trop pour éviter d'éjecter la terre hors du sillon. Aussi, le disque ouvreur de faible diamètre et peu ondulé nécessite moins de pression pour pénétrer le sol et colle plus au type de machine qu'est le Pronto.
Je connais bien les différents systèmes d'enterrage et le système triple disque avec un disque ripple (50 vagues) de 16 pouces maxi est ce qui existe de plus polyvalent dans notre contexte. J'ai déjà l'expérience des modifications apportées au semoir monograine MaxEmerge de l'exploitation. Sur ce dernier les modifications sont plus simples car il existe des kits (ressorts de terrage, disque ouvreur, chasse débris, roues de fermeture à pics, pneus RID). Sur une culture comme le maïs en non-labour, un semoir mal réglé et mal équipé sera visible rapidement et peut entrainer 30% de pertes de rendement.
Les pièces venant d’Agripartner sont des lames ressort de type Héliodor, les roulements SKF baa004 et les disques 50 vagues diamètre 430mm. En gros, c'était le meilleur compromis prix/facilité de montage/passage sous châssis. Le type de disque je le connaissais déjà avant avec l'expérience du MaxEmerge et le type de lame ressort aussi avec l'Héliodor présent sur la ferme. La lame a tendance à un peu bouger latéralement mais ça ne pose pas vraiment problème. Il est sûr que le montage ne donne pas un travail aussi précis qu'un montage avec un système plus complexe.
Quels sont les intérêts de ce type de montage d’un point de vue agronomique, économique, environnemental ?
Au niveau de l'agronomie, la qualité du semis est meilleure qu'avant surtout en conditions sèches ou fortes en résidus. L'implantation est plus facile car le sol n'a besoin que d'être ressuyé en surface. On ne mélange plus les couches comme avec les bêches roulantes. Le reste des bénéfices agronomiques est surtout lié à l'agriculture de conservation. L'inconvénient c'est que ce montage ne fonctionnera pas sur un sol travaillé profond.
D'un point de vue économique j'ai gagné 1.5 l/ha de fuel en moyenne (6 à 7 l/ha avec le montage d'origine, 3.5 à 5 l/ha actuellement). Je ne sais pas s'il y a un gain de rendement.
Au niveau de l'environnement, cela permet d'économiser du CO2 via l'économie de carburant. Si le sol est moins travaillé à l'implantation, il émettra aussi moins de CO2. On rentre tout à fait dans l'agriculture de conservation avec une logique de stockage du carbone dans le sol.
Combien de temps pour réaliser votre outil ?
- Trouver les bonnes pièces (lames et disques) qui passent dans le châssis de la machine et le type de montage : 50 heures d'internet !
- Se casser la tête pour garder le système de réglage de profondeur hydraulique et savoir où monter le tout : 12 heures
- Négociations commerciales : 3 heures (Audrey est difficile en affaires…)
- Total temps de cerveau : 65 heures
- Montage à proprement dit et préparation de la poutre (soudure des supports et perçage) : 10 heures
- Déplacements et divers : 5 heures
Quel est le coût global ?
En comptant le pack disque ouvreur acheté chez Agripartner, la poutre acier 355s en 80mm, les pièces découpées laser par un professionnel, la location fraise perçage et les électrodes, on arrive à un coût global de 4500e HT. A rajouter 960 euros de main d'œuvre si on veut être précis.
Avec le recul et le travail déjà réalisé avec l’outil, êtes-vous satisfait du travail de l’outil ? Avez-vous constaté des failles, des points d’amélioration ?
Le travail me convient et j'en suis assez satisfait.
Cependant, vu le faible dégagement que j'ai sous le châssis je n'ai pas pu monter les disques sur 2 rangées et cela peut poser problème dans 2 cas :
- Des pierres se coincent entre la lame et le disque.
- En sol très humide et argileux, la terre entre les disques a tendance à être soulevée et des fois décollée complètement (perturbation du sol).
En terme de produit lié à l’auto-construction, avez-vous trouvé facilement ce que vous recherchiez ?
J'ai trouvé un bon compromis chez vous. C'est vrai que la lame avec un montage par bride aurait été top ! Car plus facile à monter. Le perçage de la poutre était assez galère surtout pour respecter l'alignement des trous. Si c'était à refaire je referais le perçage des trous mieux que ça.
Avez-vous d’autres projets ?
Le prochain sera certainement la construction d'un semoir d'inter-rang en 6m avec un ami. C'est un projet qui va être lourd. Si ce dernier fonctionne, je construis un semoir de 6m.
Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui débute dans l’auto-construction ?
- Très bien réfléchir sur le plan de montage, ne pas hésiter à se renseigner sur les matériels existants pour s'en inspirer.
- Savoir rester ouvert et ne pas avoir peur de changer ses plans (j'en ai fait une vingtaine).
- Attention aux prix des pièces qui peuvent dépasser le prix d'un matériel.
- Faire un budget et s'y tenir.
- Si c'est un châssis auto-construit, ne pas hésiter à sur-dimensionner histoire d'avoir de la place pour le montage et les évolutions futures.
- Bien réfléchir en amont sur son projet.
- Avoir et prendre le temps de mener la chose jusqu'au bout.
Merci à Nicolas de nous avoir partagé, avec passion, son expérience et son savoir-faire.
Vous êtes tenté par l’auto-construction ? Vous souhaitez être accompagné dans votre projet ?
Des solutions existent. Ce sont nos échanges qui font la richesse d'expérience et qui nous permettent d'étoffer notre gamme de produits dédiée à l'auto-construction. Mais l'écoute vient du terrain (de vous), nous ne devons pas l'oublier.
Nos experts sont à votre écoute pour trouver des solutions adaptées à vos besoins.
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Jérôme, polyculteur-éleveur en Charente-Maritime et client Agripartner, nous accueille sur sa ferme pour nous dévoiler son outil fait-maison : un semoir en semis-direct.
L'agriculture moderne est constamment à la recherche de méthodes innovantes et durables pour optimiser la production tout en préservant l'environnement. Le strip-till est une technique de plus en plus adoptée par les agriculteurs. Cette méthode gagne en popularité en raison de ses nombreux avantages en termes de gestion des cultures et de conservation des ressources naturelles. Mais de quoi s'agit-il réellement ?
"Aujourd’hui le semis-direct est fondamental dans notre secteur et dans notre contexte pédoclimatique. On le voit très bien avec le changement climatique. On le prend de plein fouet. On est dans des zones intermédiaires très séchantes. Notre principale préoccupation sur la ferme c’est la gestion de l’eau. Et cette gestion de l’eau elle passe par le non-travail du sol ». Benjamin AUDE